La beauté des ruines – Barbara Israël

Alexandre Dulaunoy & Miles Davos 2 minute(s) de lecture possible samedi 23 août 2025 224 mots et d'autres choses
paris chronique lecture

Je ne sais pas quoi faire après la lecture de La beauté des ruines de Barbara Israël. Dois-je écrire une critique d’un livre qui est à la fois beau et nombriliste ? Un truc parisien, mais qui se veut en même temps universaliste ? Qui contient de magnifiques phrases, mais aussi des passages pitoyables ? Qui est culturellement évocateur, mais peut aussi sembler pauvre intellectuellement ? Qui évoque son passé avec une lumière singulière, mais paraît parfois détaché de la réalité ? De superbes éclats côtoient des maladresses affligeantes. Mais n’est-ce pas justement là la beauté de ce livre ? Non pas ses ruines, mais le paradoxe de nos vies : tout oscille, sans jamais se stabiliser.

Audrey Tautou – Superfacial

Alexandre Dulaunoy 2 minute(s) de lecture possible mardi 19 août 2025 317 mots et d'autres choses
photographie chronique art exposition

Tout le monde croit connaître Audrey Tautou. On pense la saisir à travers ses rôles d’actrice devenus presque mythiques, comme Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain. Mais c’est bien plus complexe : comme beaucoup d’entre nous, elle n’expose qu’une parcelle d’elle-même, sans jamais livrer totalement son intime conviction ni, surtout, sa véritable capacité créative.

En allant voir son exposition Superfacial au Quai de la Photo, ce centre d’art flottant sur la Seine, je nourrissais un a priori : celui du risque d’un certain nombrilisme. Et pourtant, ma surprise fut grande en découvrant un travail photographique intimiste, empreint de persévérance et traversé par une audace réelle. De prime abord, l’exposition peut dérouter : une série de planches-contact en grand format, posées là comme un travail préparatoire.

Richard Avedon In the American West

Alexandre Dulaunoy 2 minute(s) de lecture possible dimanche 17 août 2025 236 mots et d'autres choses
photographie exposition art

Si vous ne deviez voir qu’une seule exposition photographique cette année, allez voir l’exposition Richard Avedon – In the American West, présentée à la Fondation Henri Cartier-Bresson du 30 avril au 12 octobre 2025.

In the American West est un livre iconique (si vous possédez la version originale, gardez-la précieusement : elle a aujourd’hui une certaine valeur). De 1979 à 1984, Richard Avedon a sillonné l’Ouest américain avec un studio mobile, des assistants et une volonté affirmée de capturer l’essence de toute une population. Ses photographies mettent en lumière les hommes et les femmes issus des différentes classes ouvrières de l’époque.

Claude Garamont

Alexandre Dulaunoy 2 minute(s) de lecture possible dimanche 20 juillet 2025 294 mots et d'autres choses
typographie livre chronique art garamont

On peut parfois se croire seul. Ma passion pour la typographie ressemble davantage à une marotte qu’à quelque chose d’utile dans la vie de tous les jours. Surtout, les horreurs typographiques qui nous agressent quotidiennement finissent par altérer notre capacité à discerner ce qui est, ou non, typographiquement beau. J’avais évoqué ces errements typographiques à propos du site web du Sillon pour aboutir à une conclusion simple : utilise Garamond et tout se passera bien.

Se faire avoir

Alexandre Dulaunoy 2 minute(s) de lecture possible dimanche 20 juillet 2025 278 mots et d'autres choses
horreur livre chronique

Il arrive qu’on se fasse avoir par des libraires. Ce n’est pas souvent, mais cela arrive…

Je pénètre dans une nouvelle librairie en Belgique et je jette un œil aux tables, à la recherche de nouveautés. Une étiquette avec la note de la libraire proclame : « La nouvelle autrice capable de remplacer Stephen King ». En quatrième de couverture, on peut également lire : « Daisy Johnson est un nouveau monstre sacré de la fiction » et « un petit chef‑d’œuvre de la littérature gothique » (je ne savais pas trop ce que cela voulait dire). Tout excité, je saisis donc le bouquin, heureux à l’idée de me plonger dans un livre qui allait me retourner et me faire peur.

La photo me regardait

Alexandre Dulaunoy 1 minute(s) de lecture possible mercredi 9 juillet 2025 176 mots et d'autres choses
chronique photographie journal arles

Il y a cette sensation, parfois, face à certaines photographies. On tombe nez à nez avec une image, et il se passe quelque chose. Pas besoin qu’elle soit l’œuvre d’un grand photographe, ni de tout savoir ou de connaître l’artiste. Il suffit de la regarder, et aussitôt elle nous plonge dans un souvenir, un vieux rêve ou une sensation intime.

Aux éditions Macula, Katja Petrowskaja a publié un recueil de photographies nourri de ses émotions et de ses perceptions. Dans La photo me regardait, on plonge au cœur de son univers, entre fragments de vie et impressions sensibles.

La plus secrète mémoire des hommes

H. Galois 6 minute(s) de lecture possible samedi 5 juillet 2025 1197 mots et d'autres choses
livre critique chronique roman

Un livre de Mohamed Mbougar Sarr

C’est l’histoire d’un écrivain sénégalais entre les mains duquel tombe un vieux livre oublié, « Le labyrinthe de l’inhumain », d’un certain T. C. Elimane, auteur d’une seule œuvre dont plus personne ou presque ne sait plus rien. Commence alors la chronique d’une quête, à la recherche de l’ombre d’une étoile filante de la littérature. Le narrateur, dans cette « histoire impossible à raconter », croise un poète convaincu qu’un poète qui a plus de 120 lecteurs est suspect et d’autres auteurs atteints « d’incontinence littéraire »… Ils parlent de littérature jusqu’au bout de la nuit, constatent que le monde n’est pas si perdu puisque cela advient, et nous y entraînent, emmaillotés dans un style envoûtant. « Les grandes œuvres appauvrissent et doivent toujours appauvrir. Elles ôtent de nous le superflu » (p. 53). Mais parfois il ne reste presque plus rien. Alors c’est un long périple pour maintenir en vie une mémoire. C’est une quête impossible, pourtant intimement intriquée avec la vie, dont il ne surgira qu’une vaste, intense, mais imprécise idée : la littérature comme mystique. Le livre dit aussi l’émigration, avec par exemple de superbes pages sur l’appel aux parents, que l’auteur voit comme étant caractéristique des émigrés, mais qui est peut-être un universel. Je me suis demandé si la quête du narrateur n’était pas, paradoxalement et malgré son érudition – longtemps que je n’avais pas lu le mot shiboleth – et sa géniale composition, un processus de libération de la littérature. On y croise Borges, Sábato, Gombrowicz et d’autres pointures, on les y croise et on les y lit, textes cités ou seulement évoqués ; l’auteur joue des emprunts, comme semble avoir fait le mystérieux T. C. Elimane (citons par exemple la référence à l’idée que le hasard, qui n’est qu’un destin qu’on ignore, idée citée plusieurs fois – par exemple p. 336 – et qui est clairement un emprunt à Borges qui en faisait une équivalence). Le livre, à travers ses multiples voix imbriquées, de récits dans les récits, se demande si le mal n’est pas la seule grande question. Confirmation, si besoin en était, que la littérature se réinvente en se répétant. Et cette grande question en amène donc peut-être une autre : et si le livre essentiel, finalement, ne pouvait s’écrire ?

Ma cabane sans peine

Alexandre Dulaunoy 3 minute(s) de lecture possible lundi 9 juin 2025 462 mots et d'autres choses
chronique livre philosophie

Trouver une bonne lecture, c’est difficile, mais il ne faut jamais sous-estimer la capacité des amis à savoir quoi lire. J’ai des piles de livres, dont une avec ceux qui m’ont été prêtés. Une amie me demande si j’ai bien Ma cabane sans peine d’Alain Guyard… Bien entendu, le livre n’était pas sur la bonne pile. Suite à cette agréable pression amicale, je me suis dit que l’occasion faisait le larron pour me plonger dans cette lecture.

Joseph Mitchell - Le Fond du port

Alexandre Dulaunoy 2 minute(s) de lecture possible dimanche 1 juin 2025 292 mots et d'autres choses
chronique livre New-York

Il est rare de trouver un auteur capable de restituer, en littérature, le sentiment que procure la photographie de rue. Il capture les rues, les bâtiments, les rencontres comme des archives persistantes qui se dévoilent devant nos yeux. Pourtant, il existe un auteur qui pratique sans doute la photographie de rue sans appareil photo : Joseph Mitchell. Journaliste pour The New Yorker, mais surtout infatigable explorateur de New York et de ses environs.

Cloé du Trèfle - La Lueur

Alexandre Dulaunoy 2 minute(s) de lecture possible dimanche 25 mai 2025 263 mots et d'autres choses
chronique musique art poésie

Par un truchement de recherches obscures sur Internet, je tombe littéralement sur le nouvel album La lueur de Cloé du Trèfle, publié le 4 avril 2025. J’écoute Électrons libres en premier, dans le train qui m’emmène au travail, et j’entends cette phrase :

« Pourquoi ce trou noir, vers lequel nous filons dangereusement à toute allure, est-il si rayonnant ? »

Cette phrase ne m’a plus quitté de la journée. Pendant quelques heures, j’ai cru qu’elle venait d’un auteur célèbre. Elle m’a obsédé entre deux réunions, certaines aussi pesantes qu’un effondrement gravitationnel, d’autres lumineuses comme une conversation sincère entre collègues. Cette phrase était là, en boucle dans ma tête, me soufflant : Écoute le reste de l’album, couillon!