Naître sans cesse

Alexandre Dulaunoy 2 minute(s) de lecture possible dimanche 22 septembre 2024 271 mots et d'autres choses
livre critique chronique photographie

Avoir entre les mains le journal d’un photographe, c’est souvent comme disposer d’une carte ou d’un guide pour mieux comprendre son travail. Ici, Naître sans cesse, le journal du photographe Jean-Christian Bourcart, nous plonge dans ses activités photographiques. Je connaissais déjà un peu son travail et j’avais toujours voulu connaître ses techniques pour photographier dans des milieux difficiles ou peu enclins à laisser un photographe travailler.

Il décrit avec clarté son travail à Camden (États-Unis) et la manière dont il se fait régulièrement racketter. C’est un récit fascinant qui montre bien son acharnement à explorer les côtés les plus sombres de la société. Ce journal révèle une étrange alternance entre sa vie personnelle, ses amours, sa sexualité, et sa quête de capturer en images des réalités que l’on préfère souvent ignorer.

Les furtifs

H. Galois 6 minute(s) de lecture possible samedi 21 septembre 2024 1159 mots et d'autres choses
livre critique chronique roman

Un livre d’Alain Damasio

Cet été a eu lieu ma troisième tentative. Par deux fois j’avais essayé, sans succès. Finir ses livres relevait d’une marche tortueuse contre vents et furvents, comme celle qu’endurent les protagonistes de la « Horde du Contrevent ».

En général, je n’ai pas d’états d’âme à suspendre une lecture, à me séparer d’un auteur ou d’une autrice. Mais là, ça me faisait de la peine. C’est que Damasio, de ce que j’en sais, a tout pour m’être aimable. Il écrit des pures fictions, à contre-courant de l’air du temps biopic et auto-fictionnel qui m’exaspère souvent ; il mêle roman et philosophie, sociologie, c’est-à-dire qu’il donne à penser notre monde, et pas uniquement des histoires pour nous divertir ; je me sens assez proche de nombre de ses idées et conceptions politiques ; il a des réflexions très intéressantes sur les technologies - le pouvoir qu’elles donnent et la puissance qu’elles amoindrissent -, la liberté et l’oppression ; il a une créativité admirable, enviable, illustrée par sa magistrale idée de trouver dans la typographie un nouveau mode d’expression, c’est-à-dire de transmettre du sens dans la forme des lettres et des mots ; des amis de confiance aiment ses livres, me les recommandent, me les offrent et me demandent si j’ai aimé… Tout me le rend aimable.

Incognita Incognita ou le plaisir de trouver ce qu’on ne cherchait pas de Mark Forsyth

Alexandre Dulaunoy 1 minute(s) de lecture possible mardi 30 juillet 2024 105 mots et d'autres choses
livre critique chronique

Mark Forsyth commence par une citation de Donald Rumsfeld (oui, le conseiller de l’administration Bush junior) pour nous inviter à réfléchir sur la complexité de découvrir ce que l’on ne sait pas que l’on ignore. Ce livre résume quelques techniques pour dénicher des livres que l’on n’aurait jamais envisagé de lire. C’est surtout un pamphlet en faveur des librairies et des livres. Pour 5,50 euros, vous avez droit à deux citations du renseignement militaire américain qui vous guideront vers l’amour de l’inconnu en lecture.

Chronique - Vallée du silicium

Alexandre Dulaunoy 4 minute(s) de lecture possible dimanche 21 juillet 2024 659 mots et d'autres choses
livre critique chronique

Oui, ici c’est le Sillon Fictionnel, mais notre sillon est proche du dioxyde de silicium. Nous sommes les enfants des premiers transistors, des langages informatiques, du logiciel libre et même des modems 2400 baud. Alors, quand on voit en rayonnage un livre nommé “La Vallée du Silicium”, on ne peut que se ruer dessus.

On ne peut pas toujours aimer Alain Damasio, mais j’apprécie son travail chaotique, brouillon et parfois parcellaire. Il y a souvent dans ses œuvres des moments d’une grande lucidité ou d’une clarté intemporelle.

Chronique - L’espace commence ainsi

Alexandre Dulaunoy 1 minute(s) de lecture possible dimanche 23 juin 2024 130 mots et d'autres choses
livre critique chronique

Il y a des jours comme ça. Votre marqueur explose lors d’une lecture. Est-ce un hasard ? Une tache sur le mot “page”. Tout cela en lisant “L’espace commence ainsi” de François Bon. Un livre dans la collection Perec 53 (53 livres de 53 pages par 53 artistes). Il y a sûrement 53 coulures sur ce livre. J’ai défini mon espace. Délimiter nos vies, nos cadres, nos perceptions, nos territoires… en fait, Perec serait fier de moi. Partir d’un espace et délimiter son univers. Il l’a fait. François Bon nous rappelle les pérégrinations de Perec. On ne sait toujours pas où on est. Mais ce n’est pas grave, c’est juste notre géographie. Le texte n’est qu’une structure, une ébauche éclatée, mais tout cela pour exister.

Chronique - Libertés d'écoute - Le son, véhicule de la relation

Alexandre Dulaunoy 2 minute(s) de lecture possible dimanche 2 juin 2024 236 mots et d'autres choses
livre critique chronique

Je ne sais pas pour vous, mais lorsque j’écoute une émission à la radio, mon oreille est souvent plus attentive aux détails qui soutiennent un discours ou une explication. Par exemple, il arrive que dans les films, un son soit en inadéquation avec son environnement. Cette dissonance permet au spectateur de mieux se concentrer sur une scène. C’est un sujet qui m’a toujours passionné, mais je n’avais jamais trouvé de livre sur la création des objets sonores. Il existe des ouvrages techniques pour les créateurs sonores, mais Libertés d’écoute - Le son, véhicule de la relation de Daniel Deshays est un livre qui traite du silence et du son pour soutenir des créations artistiques.

Chronique - Voyages sans bagages - Tove Jansson

Alexandre Dulaunoy 1 minute(s) de lecture possible dimanche 26 mai 2024 129 mots et d'autres choses
livre critique chronique

Une petite découverte littéraire lors de la foire du livre à Bruxelles, au stand du Québec qui regorge de belles perles littéraires. “Voyages sans bagages” de Tove Jansson est un recueil de nouvelles pleines de sagesse. Des lectures qui peuvent nous faire penser à ces instants de vie entre deux situations, cette perte de repères lors d’un voyage, d’un décalage horaire ou lorsque l’on contemple intensément un paysage. Je ne connaissais pas Tove Jansson, mais cette approche humaniste et empreinte de réalités simples me fait chavirer dans d’autres pensées… Nos vies sont pleines de bagages, mais ici on les laisse de côté et on se laisse porter à la dérive.

Mon oncle d'Australie

H. Galois 4 minute(s) de lecture possible mardi 30 avril 2024 735 mots et d'autres choses
livre critique chronique roman

Un livre de François Garde

« Que serait une famille sans secret de famille » (p. 159)

Dénouer un secret de famille si profondément enfoui dans une lignée qu’il ne se révèle que fortuitement, ça peut faire un bon livre. L’oncle du grand-père de François Garde est parti en Australie, en 1900, ou plutôt… a été exilé, banni, ce qui est aussi partir, l’envie en moins.

Pourquoi ? Personne ne le sait. Comment, on ne peut que l’imaginer. Qu’est-il devenu ? C’est l’histoire d’un roman. C’est une vie dans le blanc des cartes, et nous y avons déjà rencontré François Garde (« La Baleine dans tous ses états » et « Ce qu’il advint du sauvage blanc ») flânant en de lointaines latitudes. Le propre père du narrateur – ce dernier aura la délicatesse d’attendre sa disparition avant de publier son livre – confiait avoir souvent rêvé à son oncle d’Australie. Pourtant, dans cette famille aisée, par les choses et par la culture, une telle disparition est extraordinaire : « Les nantis restent chez eux. Les gens heureux ne prennent pas l’amer chemin de l’exil » (p. 27). Par dépit, et n’ayant aucune bonne source, le romancier sort du bois et y laisse, pour un temps, la réalité familiale. Alors le livre commence par ce geste de démiurge – que j’ai souvent eu – de compléter la réalité en l’écrivant, en inventant des pans inconnus d’une histoire, d’une biographie. Il m’est même arrivé d’avoir l’impulsion de réécrire la fin d’un roman que j’avais trouvé trop triste (affreuse tentation heureusement avortée, qui m’avait par exemple saisi à la fin de « Pour qui sonne le glas », de Hemingway ; j’étais adolescent, je rencontrais un grand écrivain). Alors nous voilà partis pour l’Australie où débarque le jeune Marcel qui « doit oublier son goût méditerranéen pour les propos percutants et sonores, cesser de trop vouloir convaincre, accepter de s’excuser à tout instant et à tout propos, maîtriser l’art de la litote et l’inachèvement. Nul n’apprécie les démonstrations brillantes et les paradoxes amusants qui faisaient, à Vaucluse, le sel des conversations. Ici, l’énoncé de banalités manifeste non la balourdise, mais l’appartenance à la communauté. Celui qui profère une évidence s’abaisse et atteste ainsi de son humilité. L’éloquence n’est plus une vertu, mais une impudeur, voire un aveu de faiblesse. Aux antipodes, le silence est une rhétorique » (p. 88). Il y découvre « une vérité cruelle, réitérée soir et matin : l’exil n’est que le nom vindicatif de l’absence » (p. 115).

Lac Noir

Alexandre Dulaunoy 1 minute(s) de lecture possible dimanche 28 avril 2024 184 mots et d'autres choses
photo critique photographie poésie livre

La poésie n’est généralement pas ce qui m’attire lorsque je flâne entre les rayonnages d’une librairie. Toutefois, se perdre dans une foire du livre à Bruxelles, notamment au stand de Québec Édition, c’est un véritable voyage qui brouille les repères. Un livre intitulé “Lac Noir”, orné d’une photographie en noir et blanc, a capté mon attention. À l’ouverture, des coordonnées géographiques et d’autres photos m’ont convaincu que ce livre était fait pour moi. Plus tard, j’ai remarqué le nom de l’éditeur, “La Peuplade Poésie”, discrètement inscrit en bas de la page. Un instant de doute - “Oh non, de la poésie”…

Oli Kellett - Cross Road Blues

Alexandre Dulaunoy 1 minute(s) de lecture possible samedi 27 avril 2024 132 mots et d'autres choses
photo critique photographie art livre

La photographie de rue est un art diversifié ; elle peut se manifester à travers des photographies frontales au flash, à la manière de Bruce Gilden, des clichés pris dans les rues, inspirés par le style de Garry Winogrand, ou encore des sessions de chasse continue pour saisir des scènes de rue animées. Oli Kellett crée des panoramas de photographie de rue qui rappellent le travail de Gregory Crewdson, mais sans l’équipe de dix personnes en coulisses. Sa patience est son atout majeur pour obtenir une vue panoramique avec une personne perdue au milieu. On peut constater que sa sélection s’étend sur une période assez longue, révélant ainsi la rareté de cet instant parfait.