Elle, pianiste. D’exception. Lui, fils. D’architecte de renom.
Elle, française. Lui, japonais.
Nul ne sait comment ils se rencontrèrent puis décidèrent de lier leurs vies.
Nous les trouvons dans une luxueuse maison, en 2160. À l’île de Kino. Seule du Japon à rejeter les androïdes qui pullulent ailleurs : concierges, entités à tout faire, caissiers et tous ces emplois jugés subalternes, peu valorisants.
L’île de Kino, où l’on peut encore se baigner dans l’eau non polluée, préservée des errements de l’humanité.
Gianni, écrivain, de gauche, a du mal à vivre de son art malgré son succès, d’estime.
Que faire ? Écrire des scénarios, comme tant d’autres artistes, en espérant qu’ils trouvent grâce aux yeux de Netflix.
Le voici appelé à rejoindre une équipe se constituant dans ce but précis.
Certes, on attend de lui créativité et originalité, mais contraintes. Par le formatage. Par l’air du temps. Et un impératif : ne pas (trop) bousculer le public et sa sensibilité par des saillies incontrôlées, des sorties de route qui déchaîneraient cris d’orfraie et philippiques sur les réseaux sociaux.
Je viens de finir « Monica », le dernier roman graphique de Daniel Clowes. J’ai adoré. Je dirais qu’il est aussi bon que « Patience » et « Le rayon de la mort ».
C’est un excellent trip sous acide qui respecte notre intelligence et notre sensibilité de lectrices et lecteurs. Qui nous laisse la place d’imaginer, de créer les réponses qui viendraient à nous manquer. À moins d’accepter la vie telle qu’elle est : chaotique, fragile, et lacunaire.
Je me sens fatigué. Éreinté. Éteint.
L’humanité et ses errements m’épuisent.
Ère post-moderne, dites-vous ? Arrêtons de faire semblant s’il vous plaît. Qui espérons-nous abuser ? Nous-mêmes ? Ère de l’idiotie, de la médiocrité, de la petitesse d’esprit, et de la course effrénée sans raison aucune.
Envie de tout lâcher. De me terrer en haut d’une montagne pour des jours, des semaines ou des mois. Loin de tout et surtout de l’égocentrisme, du populisme, du racisme, du capitalisme glouton, et de l’insidieuse bureaucratie.
Des rires percèrent tel un soleil radieux la brume de ma fatigue.
Las, je ne voulais qu’une chose l’instant d’avant. Me recroqueviller, en ermite, hors des affaires des hommes et des femmes qui n’ont qu’une pensée : l’argent. Pour le pouvoir sinon pour la survie.
Si j’avais pu me cloîtrer dans un village du Haut Atlas loin de l’égotisme, du népotisme, et des esprits étriqués, je l’aurais fait. Cependant, je danse comme les autres.
Il est une maxime, un commun, que l’on assène, en cacique du savoir : « tout bon mensonge comporte une part de vérité ». Il existe d’autres variations. Mais attardons-nous un peu sur celle-ci. Réfléchissons. Inversons et, en dépositaires du contrepied, osons : « toute vérité comporte une part de mensonge ». Laissons de côté la distinction entre mauvaise et bonne vérité, comme on ne le ferait pas pour le mensonge.