Chronique - Le gourmet solitaire
bd critique chronique manga
Le gourmet solitaire (孤独のグルメ, kodoku no gurume) Jirō Taniguchi, d’après un personnage de Masayuki Kusumi.
Je ne sais pas ce qu’il en est pour vous, mais la bonne chère est l’une de mes plus grandes joies dans l’existence. Je n’aurai pas la prétention de me dire gourmet - en revanche, je suis certainement, évidemment, indubitablement gourmand. Et voilà un livre qui n’en finit pas de me faire saliver. C’est un cadeau qu’on m’a fait il y a plusieurs mois, et c’est comme un plat préféré : je n’ai de cesse d’y retourner.
Au gré de ses pérégrinations professionnelles (essentiellement à Tōkyō), le personnage visite différents quartiers, va de redécouvertes en découvertes et mesure au passage, occasionnellement, la marche du temps à l’aune des changements qu’il constate (tiens, cet établissement a disparu…). Il a, pour être honnête, une bien meilleure mémoire que moi : je ne pense pas être capable de me remémorer l’abricot sec d’une boîte bento mangée dans un train il y a dix ans - lui, si.
Je me délecte de ce manga essentiellement centré sur la puissance évocatrice de (re)découvertes culinaires, qui ne sont qu’un prétexte pour nous faire profiter des pensées et des sensations du personnage principal : les aliments en tranches accompagnent les tranches de vie qu’il analyse et médite en notre compagnie muette et affamée. Car il n’y a pas que les plats à savourer dans ce livre qui se lit dans le bon sens (de la droite vers la gauche, bien entendu) : les lieux et les personnages hauts en couleurs sont à croquer et truffés de détails.
Les dessins sont clairs, nets, anguleux, francs - je dirais rudes, implacables, sans concession. Les traits sont saillants, les expressions terriblement justes. On n’y croit pas : on y est, on en est. Je me régale, pour tout vous dire, et c’est comme un bon repas : je l’ai feuilleté, je me suis resservi, je m’en suis repu, je l’ai posé, je le reprendrai immanquablement.
Voulez-vous goûter ? Ah, vous connaissez déjà ? Comment ? Vous êtes des habitués ? Dans ce cas, vous en reprendrez bien un peu, même si cela fait 15 ans ?