La Sous-Bois
roman langue anticipation sf futur fantasy chronique recension
Omes, fames qui acompagnez nos explorations de ce merveilleus Sillon fictionnel, pénétrant avec nous sans nule ésitation ses riches et fertiles tères litéraires, loin de la morosité et du cromo ambiant. Je vous sens interdit.
Quelque chose vous gêne. Vous vous sentez une poussée d’urticaire à me lire aujourd’ui. Peut-être vous demandez vous quèle erbe ai-je bien pu fumer pour comètre tant de fautes d’ortografe ?
Ne partez pas s’il vous plait. Vous vérez. Tout s’expliquera. Un peu de patience. C’est tout ce que je vous demande. Vous risquez même d’aprendre un truc ou deus.
Je fus come vous. Je me croyais gardien de cète langue que nous chérissons toutes et tous. Un vaillant pourfendeur des abérations et autres impropriétés qui tavellent textes et écrits.
Mais à quoi bon apeler une langue vivante si nous tenons tant à la figer ? La vie n’est-èle pas conditionée par le mouvement, le changement, l’évolution ?
Vous me lisez depuis six paragrafes. Même si mes fautes vous iritent, un peu, beaucoup, sinon passionément, vous arivez à me lire sans problème aucun. Vous y trouvez même peut-être, sans trop vous l’avouer, un certain plaisir. Votre cerveau n’est pas entravé par des éforts de mémoire pour se rapeler de tèles exceptions à la règle, ou pour ignorer des lètres muètes. Alors il cavale le long des lignes tel un fougueus cheval à qui l’on aurait rendu sa liberté.
Ce que vous avez devant les ieus ne constitue pas une ignominie, et encore moins un signe précurseur de ma sénilité à venir. Ce que vous lisez est tout simplement écrit en ortografe rationalisée. Proposée voici bien des anées par l’association Érofa (Études pour une Rationalisation de l’Orthographe Française d’Aujourd’hui), cète ortografe vise à rationaliser, mais aussi à simplifier l’écriture et la compréension de notre bèle langue, si vivante.
C’est en lisant « La Sous-Bois » de Christophe Ségas que j’ai découvert cète ortografe et l’existence de l’association qui en est à l’origine. Tout le livre est écrit en ortografe rationalisée. Pour cela, l’auteur a utilisé l’outil de conversion mis en ligne par Valentin Gatien-Baron, membre de l’association. Le même qui a servi à convertir le présent texte.1
Au début de ma lecture, je me suis senti désarçoné. Le vieus con en moi, en indigne noble du Sillon, se croyant sachant, pour ne pas dire cacique à deus bales, a voulu prendre le dessus. Manifester son iritation. Crier à la lèse-majesté. Apeler à l’autodafé d’un aussi bon livre, d’un aussi suculent ouvrage, à l’édition très soignée. J’en profite d’ailleurs pour tirer mon chapeau bien bas à l’auteur, à Guillaume Mélère - la seule tête qui sillone les merveilleus Monts Métalifères - ainsi qu’à Renaud Buénerd. Messieurs, vous nous gratifiez là d’un travail d’orfèvre.
Certes, la bèle langue est religion. La seule qui vaille d’ailleurs au Sillon. Mais nous qui aimons tant être surpris. Nous qui aprécions tant en découvrir de nouvèles ramifications et autres branches, nous voilà bien servis.
Qu’est-ce donc « La Sous-Bois » ? C’est une machine à écrire (le nom vient de la marque Underwood), vestige de notre monde dans un Moyen-Âge futur, où l’écriture a failli disparaitre à jamais. Seuls quelques scribes savent encore lire et écrire et peuvent s’en servir pour coucher sur papier les actes héroïques, sinon le quotidien des maitres de guère et autres seigneurs qui règnent sur un monde où l’organisation tribale domine.
L’istoire se situe en l’an 380 après Reset, un évènement que l’on supose cataclismique, mais qui restera mistérieus tout le long des 220 pages de ce beau roman. L’avant Reset, dénomé Istoire-Jadis, est peu conu. Ses traces, au-delà des nombreuses abérations climatiques et génétiques qu’il a laissées en éritage, rares.
Perceval est l’un de ces scribes. Acheté par Igriega, chef de guère, il lui incombe de consigner le quotidien de la caravane dirigée par ce dernier. La République, la seule qui subsisterait dit-on, a confié à cèle-ci la tâche d’aler quérir d’anciènes semences au-delà des limites des téritoires conus pour mètre fin à la famine qui se répand.
Come vous l’aurez saisi, j’ai adoré « La Sous-Bois ». Et si le Sillon disposait d’un pris, en jury monocéphale autoproclamé, je l’aurais triplement décerné. À l’auteur, à l’éditeur, et à l’association Érofa. En toute subjectivité sillonesque, cela va de soi.
— La Sous-Bois. Christophe Ségas. Monts Métallifères. 17€.
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Veuillez noter que l’orthographe rationalisée ne change pas le mot « femme ». Or, dans le livre, « femme » est écrit « fame ». Je n’ai pas d’explication à cela. Toutefois, pour respecter le choix de l’auteur et de son éditeur, j’ai changé « femmes » en « fames » au début de ce texte. ↩︎