Dai Dark
manga critique chronique sf gore humour dark fantasy
Q Hayashida est le pseudonyme d’une mystérieuse autrice de mangas japonaise, qui protège ardemment sa vie privée. D’après la page Wikipédia qui lui est consacrée, on sait très peu de choses d’elle. Outre sa date et son lieu de naissance (1977 à Tokyo), on peut y lire qu’elle a étudié à l’Université des arts de Tokyo et que « Sofa-Chan », son premier manga, parut en 1998.
Toutefois, son nom devrait dire quelque chose à tout fan de manga qui se respecte.
« Dorohedoro », une série d’une violence inouïe, où le burlesque tient la dragée haute au grotesque, a connu un grand succès. Publiée au Japon entre 2000 et 2014, elle est venue frapper l’Hexagone à toute berzingue, comme un corps céleste. Un succès tel qu’elle est en cours de réédition sous un format luxueux, dénommé Chaos Edition par Soleil Manga, l’éditeur français de l’autrice. Par ailleurs, une partie de la série a fait l’objet d’une adaptation télévisée sous forme d’anime (diffusée dans nos contrées européennes par Netflix). Une suite est en cours de préparation.
Voici un peu plus de trois ans, Soleil Manga a publié le premier tome d’une nouvelle série de Q Hayashida : « Dai Dark ». On y retrouve pas mal d’ingrédients ayant contribué au succès de « Dorohedoro ». La violence et le gore demeurent toujours présents (âmes sensibles, abstenez-vous !), le trait admirable de l’autrice, que j’affectionne grandement, aussi. L’absurde ? Oui, totalement. Le grotesque ? Certes. Et une bonne dose d’humour aussi. Je n’ai pas pu m’empêcher de sourire, voire de rire aux éclats de nombreuses fois durant la lecture des huit tomes actuellement parus.
De quoi s’agit-il donc ?
Nous suivons les aventures cocasses de Sanko Zaha, un adolescent un peu tête en l’air, à travers l’espace infini. Il se dit que ses os permettent d’exaucer tous les vœux. Vous ne serez alors pas surpris d’apprendre que chacun ou presque dans l’univers « Dai Dark » espère mettre la main sur le pauvre Sanko afin de le dépecer.
Et comme si cela n’était pas suffisant, Lighthead, une organisation maléfique dotée de moyens colossaux, pourchasse sans relâche Sanko, qualifié de fléau. Heureusement, il peut compter sur sa force, ainsi que sur ses amis. Parmi eux, on compte Avakian, son sakadoh des ténèbres (oui, c’est un sac à dos, mais du genre spécial), Death Delamort, une amie d’enfance de Sanko qui semble posséder des pouvoirs illimités, mais qui n’en fait qu’à sa tête, même dans les moments les plus critiques, et Tocard Primus, un être énigmatique qui peut se régénérer à l’article de la mort. Ce dernier peut aussi compter sur l’aide de Cognhard, sa fidèle armure à la résistance exceptionnelle.
Bien qu’ils ne soient pas de fins stratèges, ayant plutôt tendance à foncer tête baissée, même dans les pièges les plus évidents, et à réfléchir après, la bande à Sanko arrive à s’en sortir tant bien que mal, bataille après bataille.
La série alterne le présent, où Sanko a 14 ans, et le passé, où on le retrouve à différents âges de l’enfance, suivant ses pérégrinations, sa progression, et ses rencontres avec des personnages hauts en couleur et souvent peu ragoûtants.
Q Hayashida réussit pour l’instant à maintenir un univers riche et très cohérent (enfin, cohérent dans son absurdité et ses propriétés physiques pour le moins surprenantes). La folie, que je ne qualifierais pas vraiment de douce, et la créativité complètement déjantée qui sous-tendent la série, le soin apporté aux personnages principaux et au mystère qui les entoure, soulevé ici et là délicatement, sans oublier le dessin (je le répète : j’adore !) m’accrochent fort bien, à tel point que je guette, tel l’enfant que je ne suis plus (quoique…), la sortie de chaque nouveau tome.
Si vous aimez le foutraque, la dark fantasy, le gore et l’humour en veux-tu en voilà, embarquez vite avec Sanko, Avakian, Death Delamort, Tocard Primus et Cognhard. Vos zygomatiques vous en remercieront, surtout en ces temps tristes et crispants.
— Dai Dark (série). Q Hayashida. Soleil Manga (éditions Soleil). 8 tomes parus. 12,99€ le tome.