Cinéma - Jouer avec le feu

Alexandre Dulaunoy 3 minute(s) de lecture possible dimanche 26 janvier 2025 475 mots et d'autres choses
critique cinema art musique film adaptation

Choisir un film, c’est un peu comme jouer à la roulette russe, mais parfois, la sélection se fait grâce à la présence d’un acteur dans une œuvre. Ensuite, il ne reste plus qu’à se laisser emporter par les vagues – ou devrais-je dire les sillons – des images…

Jouer avec le feu, un film des sœurs Delphine et Muriel Coulin (oui, il n’y a pas que les frères Dardenne…), est une adaptation libre du livre de Laurent Petitmangin, Ce qu’il faut de nuit (que je n’ai pas encore lu).

L’histoire se déroule dans la région du Grand Est, entre Metz, Villerupt, Nancy et Hayange. Les cadrages sont serrés, avec une grande ouverture, créant une proximité presque étouffante.

Vincent Lindon incarne un père qui élève seul ses deux fils. L’un d’eux, joué par Benjamin Voisin – un acteur remarquable, particulièrement dans ce rôle chargé d’ambiguïté –, se rapproche dangereusement de la mouvance néo-nazie et sombre peu à peu dans un discours xénophobe et raciste.

chasing the night one more time by Alexandre Dulaunoy - https://www.flickr.com/photos/adulau/49221743811/

Le film interroge ce mythe selon lequel éduquer quelqu’un devrait forcément conduire à un résultat prévisible ou systématique… mais ce n’est pas aussi simple. Cette approche apporte une profonde humanité à nos différences et explore l’idée que chacun, à sa manière, poursuit une quête originelle : celle de l’appartenance à un groupe1.

Les réalisatrices illustrent brillamment cette nécessité quasi animale de faire partie d’un groupe – même des pires.

Ce film, rempli de paradoxes, nous offre la performance du jeune acteur Arnaud Rebotini, qui apporte une belle et sincère présence à l’amitié. Cependant, le véritable paradoxe ne réside pas dans son jeu, mais dans la bande-son, qui est l’un des aspects les moins aboutis du film. Elle manque de punch et d’envergure, ce qui atténue son impact global.

Ironiquement, Rebotini n’est pas seulement acteur mais aussi un musicien talentueux, reconnu pour ses compositions originales dans des œuvres comme 120 Battements par minute ou Curiosa. S’il avait été en charge de la bande-son, le film aurait sans doute gagné en profondeur sonore et en intensité émotionnelle, renforçant encore davantage l’atmosphère et les thèmes du récit.

Sorti sur les écrans depuis le mercredi 22 janvier 2025.

– Photographie chasing the night one more time par votre serviteur dévoué.


  1. Il est assez impressionnant de voir certains commentaires et critiques sur le film qui interprètent l’œuvre comme un acte politique des réalisatrices contre l’extrême droite, voire comme un rejet des électeurs de cette mouvance. Pourtant, il est assez clair que les plateformes proposant ces analyses semblent soumises au diktat de la visibilité sur les réseaux sociaux et à la pression de leurs annonceurs. C’est un peu comme revendiquer que l’art ne doit pas être politique, une formule qui, sous des apparences polies, cache une pensée plus radicale : je brûle les livres de mes ennemis et je ne laisse qu’un seul ouvrage dans la bibliothèque. ↩︎