Deborah Levy et Francois Avril

Alexandre Dulaunoy 3 minute(s) de lecture possible dimanche 18 mai 2025 464 mots et d'autres choses
chronique livre art philosophie

Lire plusieurs livres en parallèle donne une dimension plus riche à ses lectures. On entend souvent dire qu’il est impossible d’apprécier pleinement un ouvrage lorsqu’on en lit plusieurs à la fois. J’ai l’intime conviction que c’est une idée reçue. Notre monde n’est pas constitué de vases clos. On discute, on échange, on crée des ponts. On construit son univers à travers ses lectures, mais aussi grâce à la manière dont on les assemble.

Je ne sais pas trop pourquoi, mais je me suis retrouvé à lire deux livres en même temps. L’un est un livre graphique de François Avril, accompagné d’un texte de Jean-Luc Coatalem, l’autre un ouvrage de Deborah Levy. Je ne connaissais aucun de ces auteurs. J’ai simplement acheté les deux livres pour des raisons totalement irrationnelles. La couverture du livre graphique était tout simplement belle. Quant à l’autre, j’ai été attiré par la typographie, et le lodiciquarte portait une belle citation : « De tous les arts, l’art de vivre est sans doute le plus important. »

D’une part, le livre Trait de Côte est un ouvrage graphique rassemblant plus de 80 œuvres réalisées en techniques mixtes (peinture, dessin, encre de Chine, acrylique…). Il représente la mer et le littoral avec une forte influence bretonne. Les paysages, assez minimalistes, invitent à rêver, à se perdre dans ses pensées. En particulier, la série Isolated House met en scène ces maisons isolées sur le rivage, dont une lueur émane, suggérant la présence d’une vie à l’intérieur de ces demeures silencieuses.

Le texte évoque Lesley Blanch, qui parlait de « ce paysage secret auquel nous aspirons ». Et c’est vrai, qui n’a jamais rêvé d’une maison au bord de la mer, pour y travailler, rêvasser ou simplement dormir ? C’est là que je me suis rendu compte que le livre de Deborah Levy, État des lieux, une œuvre autobiographique, parle justement de sa vie, mais surtout de ses lieux d’écriture, et de cette maison fantôme, imaginée, idéalisée dés le début du livre.

Les choses sont parfois étonnamment bien connectées. Les deux éditeurs eux-mêmes semblent participer à cette résonance : Les Éditions du Sous-Sol (dont le nom évoque déjà un lieu) publient Deborah Levy, tandis que François Avril est édité par Locus Solus, une expression latine qui signifie « lieu solitaire ».

Le Sillon ne serait-il pas, lui aussi, un lieu de vie, de travail, d’imaginaire, un espace où l’on se sent bien, où l’on cultive un certain art de vivre ? Il nous reste la lecture pour entretenir cet art qui nous réchauffe, comme cette maison au bord de la mer, éclairée d’une lueur dans une bibliothèque cosy.


  • État des lieux, Deborah Levy, Trad. Céline Leroy, Ed. Editions du Sous-sol
  • Trait de côte - Images de François Avril, Jean-Luc Coatalem (textes), Ed. Locus Solus

Couvertures de Trait de Côte, Francois Avril et Etat des lieux, Deborah Levy